Le journal Le Monde vient de publier le 25 février dernier un article intitulé « Frustrée la jeunesse française rêve d'en découdre ». Cet article fait suite à une enquête réalisée à l'automne 2013 auprès de plus de 200 000 jeunes de 18 à 34 ans.
Ce matériau de recherche exceptionnel regroupant plus de 21 millions de réponses a été analysé par deux sociologues de la jeunesse, maîtres de conférences, Cécile Van de Velde et Camille Peugny.
Les enseignements qu'ils en tirent, en particulier sur la tranche d'âge des 18-25 ans méritent que l'on s'y attarde.
Les anarchistes ont certainement des réflexions et actions à tirer de ces résultats !
- La vie en noir :
Les mots-clés choisis pour définir leur génération sont édifiants : « sacrifiés », « perdue », « désabusée »...45 % des 18-25 ans pensent que leur vie sera pire que celle de leurs parents, et 43 % pensent que cela sera pire encore pour leurs propres enfants. Si le poids du discours de crise est manifeste dans ses réponses, la projection négative dans l'avenir est bien le résultat des expériences vécues dont celle du chômage en particulier.
- Un besoin de reconnaissance :
Près de 70 % des jeunes ont le sentiment que la société ne leur donne pas les moyens de montrer ce dont ils sont capables et 61 % rejettent un système éducatif inégalitaire ! Dans la sphère professionnelle ils sont 60 % à penser ne pas être payer à la hauteur de leur qualification.
Pour s'en sortir, ils avouent « être individualistes, plus par dépit que par essence » et effectivement 77 % d'entre eux estiment nécessaires les liens de solidarité.
- La valeur travail :
25 % connaissent le chômage et si 81 % des répondants disent que le travail est important dans leur vie, plus de la moitié privilégient l'équilibre vie privée-vie professionnelle. Globalement la majorité des jeunes ont le « sentiment insupportable que leur destin est aux mains des autres, que toute perspective leur ait interdite ».
- Et la politique ? :
40 % des jeunes sont sceptiques à l'égard des médias, 46 % n'ont pas du tout confiance dans les femmes et hommes politiques et 60 % se méfient des institutions religieuses.
Pour plus de la moitié des 18-25 ans les politiques sont « tous corrompus » et ont conscience que c'est la finance qui dirige le monde.La démocratie ne s'adresse pas à eux et beaucoup sont ceux qui n'iront plus voter en affirmant que « ce sera une abstention politique, réfléchie, presque militante ».
A l'opposé de la politique traditionnelle, 80 % des jeunes disent vouloir s'engager dans le militantisme de terrain : associations, solidarités locales etc.
A l'inverse des discours sécuritaires et xénophobes ambiants, ils sont 70 % à estimer que l'immigration est une source d'enrichissement culturel.
- Un vent de révolte :
Les deux sociologues s'accordent pour qualifier le fort potentiel de révolte de ces jeunes de « Cocotte-Minute sans soupape ».Face à un besoin d'expression étouffé, de non reconnaissance sociale, de multiples frustrations, ils sont 61 % à se dire prêt à participer à une révolte type Mai 68.
Contrairement à ce que l'on pourrait penser « les jeunes ne sont pas dans la résignation et il y a bien une énergie latente, comme en 1968. Il suffit d'une étincelle ».
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