samedi 27 décembre 2014

Espagne : la rue bientôt bâillonnée ?

Le Partido popular l'a voté seul, grâce à sa majorité absolue au Parlement espagnol : la "loi organique de sécurité citoyenne", connue sous le nom de "loi bâillon". Concrètement, le gouvernement souhaite ainsi donner plus de pouvoirs aux forces de l'ordre, afin de limiter fortement le nombre et l'ampleur des manifestations. Mais la dérive n'est pas très loin et ce sont plusieurs libertés fondamentales qui se verraient bafouées.

Les députés espagnols, ou du moins ceux de la majorité parlementaire conservatrice, ont voté en séance la semaine dernière la « loi organique de sécurité citoyenne  », plus connue sous le quolibet que lui ont donné ses détracteurs de « ley mordaza », littéralement « loi bâillon ». Pour Paul Aubert, professeur de civilisation espagnole contemporaine à l’université d’Aix-Marseille, que Marianne a interrogé à ce sujet, la traduction la plus exacte serait « loi muselière ». Pourquoi un tel surnom ? C’est que cette loi « ambiguë et dangereuse » vient fortement « limiter les droits et les libertés des citoyens (manifestations, réunions, expression, etc.) afin de mieux garantir la sécurité » en donnant plus de pouvoirs aux forces de l’ordre.
 
Quarante-cinq délits sont concernés et donc ce sont 45 peines qui se retrouvent durcies. Outre le fait que cette « loi muselière » punie plus sévèrement les délits liés à la prostitution, à la drogue ou aux occupations illégales d’un logement, elle a pour principale cible le manifestant. L’idée d'accentuer la répression a germé dans le cerveau du gouvernement depuis les manifestations des Indignés, ce mouvement lui étant devenue ingérable, non par sa violence mais par sa persévérance. Mais cette situation est loin maintenant, et l’Espagne, malgré la crise, la pauvreté et la rancœur permanente contre les élites ultra-corrompues, est calme. Alors beaucoup se demandent pourquoi une telle loi vient éclore aujourd’hui ? D’ailleurs, tous les partis d’opposition ont, pour l’occasion, formé un front commun. En vain.
 
Une justice... sans juge
 
Principale caractéristique de cette loi : « Elle transforme en actes administratifs des actes laissés autrefois à l’appréciation du juge », nous explique Paul Aubert. Dès lors, des délits punis par le code pénal deviennent des fautes administratives, ce qui entraîne donc le paiement d’amendes administratives. Désormais donc, pour les délits concernés, plus besoin de passer devant une cour de justice, c’est l’administration qui prend tout en charge. Plus de juge, d’avocat, etc. Rien que des policiers et des fonctionnaires. Il s’agit pourtant d’amendes classées en trois catégories pouvant monter jusqu’à 600 000 euros. En quelque sorte, une personne accusée d’avoir commis un de ces délits doit d’abord payer. Si elle souhaite contester sa peine, elle d’adresse à la juridiction « contentieux administratif » pour laquelle a été créée une toute nouvelle taxe. Pour une justice accessible à tous, on repassera !
 
Désormais, par exemple, manifester devant les bâtiments publics constitue une « faute grave » pouvant être punie d’une amende allant jusqu’à 30 000 euros. Faute qui devient « très grave » si les manifestants pénètrent dans l’édifice en question. Là, la bagatelle pourra coûter 600 000 euros. De même, il est interdit d’occuper une banque ou d’« escalader des édifices ou des monuments sans autorisation ». Et, pour chapoter le tout, comme il est plus qu’interdit de braver un interdit, ainsi, si une quelconque manifestation est prohibée, y participer relève là aussi de la faute « très grave ».
 
Afin de se justifier, le Partido popular a fait appel à Conrado Escobar, porte-parole de la commission Intérieur, lequel a osé déclarer que « les manifestations seront plus libres, car elles seront protégées des violences » ! Pour lui, sans rire, cette loi serait même une « avancée démocratique ». Mais pour Paul Aubert, cette nouvelle loi représente surtout une « menace pour les garanties constitutionnelles (inviolabilité du domicile, liberté d’expression, liberté de réunion, liberté de manifestation, etc.) ainsi que pour le droit d’asile ».
 
Car la deuxième cible de choix de cette loi, c’est le migrant. Tout individu qui serait pris en train de passer les frontières des enclaves marocaines de Ceuta et Melilla sera renvoyé « à chaud »illico presto de l’autre côté. Adios donc tout droit à l’assistance juridique, ou toute forme de prise en charge, qu’elle soit sanitaire ou humanitaire, jusqu'à ce qu’il soit décidé du sort du migrant.
 
Certains craignent de voir leur pays renouer avec des vieilles pratiques peu glorieuses. Et il n’est pas seulement question d’éditorialistes redoutant de revivre les — trop souvent convoquées en France — « heures sombres du passé »Pedro Sanchez, le jeune chef de file du PSOE a qualifié Mariano Rajoy de président du gouvernement « le plus rétrograde de l’Histoire », ajoutant qu’il ne lui manquait plus que de reprendre à son compte cette expression franquiste : « La rue est mienne ». Ambiance…
 
Une police toute-puissante
 
Cette loi risque en tout cas, d’après Paul Aubert, de permettre « aux forces de police d’agir plus vite mais ne les met pas à l’abri d’abus ». Tout ce qui relèverait du manque de respect, de l’insulte ou de l’outrage est plus sévèrement puni. Mais, plus inquiétant, un policier peut donner une amende dite « légère » (entre 100 et 600 euros) a tout individu qui refuserait de décliner son identité. Filmer la police et diffuser les images sans autorisation devient par ailleurs une faute grave.
 
Pour Paul Aubert, « c’est bien la démocratie qui est en jeu ». Cette loi n’est pas encore en vigueur en Espagne, elle doit maintenant être ratifiée par le Sénat. Si celui-ci l’approuve sans l’amender, alors la « loi muselière » sera effective, au grand dam des Espagnols. Une manifestation de protestation s’est déroulée ce samedi 20 décembre. La dernière
?

mardi 16 décembre 2014

Laïcité: lettre ouverte aux élus

mercredi 10 décembre 2014

“Boycottez-nous !”

Propos recueillis par Claude B., NPA, le 8 décembre 2014
Entretien. Infatigable militant anticolonialiste,directeur du centre d’information alternative à Jérusalem, Michel Warchawski était de passage à Toulouse pour une réunion-débat organisée dans le cadre des rencontres Euro-méditerrannée. Il a bien voulu répondre à nos questions.
Quel bilan tires-tu de l’intervention à Gaza ?
Cette agression, présentée à tort comme une guerre, est un échec pour le gouvernement israélien. Son objectif inavoué, mettre en échec le processus de réconciliation entre le Hamas et l’Autorité palestinienne (AP), n’a pas abouti. Car ne nous y trompons pas, ce n’est pas Gaza et la résistance qui étaient visés, c’était Mahmoud Abbas !
C’est un point de vue inhabituel. Peux-tu développer ?
Israël, pour poursuivre sa politique de colonisation, a besoin de montrer qu’il n’y a pas de partenaire pour la paix. L’attaque contre Gaza visait à faire se désolidariser l’Autorité palestinienne de la résistance à Gaza. Mais ceci ne pouvait aboutir, car l’AP aurait été désavouée par le peuple palestinien si elle n’avait pas condamné cette agression. La brutalité de l’attaque a isolé Israël sur le plan international, et c’est sous la pression des USA et de l’Égypte que le gouvernement Nethanyaou a été contraint de signer un armistice.
La seule faute politique du Hamas a été d’accepter de voir les négociations sur la levée du blocus remises à 4 mois. Car la tactique d’Israël est la même depuis plus de 20 ans : remettre à plus tard les décisions, faire traîner les négociations, et continuer d’avancer dans son projet inchangé depuis sa création : poursuivre la colonisation de la Palestine. Et 4 mois plus tard, le blocus n’est toujours pas levé !
Depuis, un nouveau front s’est ouvert à Jérusalem, en particulier autour de la question de l’accès à la mosquée al-Aqsa. Le conflit peut-il changer de nature ?
Le conflit est toujours un conflit entre une puissance occupante, un État colonial, et un peuple qui veut reconquérir ses droits. En Cisjordanie, et depuis plusieurs années à Jérusalem, se poursuit la politique d’implantations des colonies. À Jérusalem, les destructions de maisons arabes et la construction de nouvelles colonies s’accélèrent. Par ailleurs, le gouvernement laisse des groupes de colons d’extrême droite multiplier les provocations sur l’esplanade des mosquées et limite l’accès de la mosquée aux Palestiniens. C’est cela la réalité.
Mais en effet, sous la pression des ultras, la politique du gouvernement cherche à déplacer aux yeux de l’opinion le conflit sur le terrain religieux. Pour cela, il s’attaque à un symbole essentiel pour tous les musulmans. Ce n’est pas nouveau : déjà en 2000, la provocation de Sharon sur l’esplanade des mosquées avait entraîné la deuxième Intifada ! Aujourd’hui, la pression des ultras dépasse même le gouvernement qui ne sait comment faire machine arrière. Au cours de négociations secrètes avec la Jordanie, Nethanyaou a été mis en garde : toucher à ce lieu saint de l’Islam ne concerne pas que les Palestiniens, mais les musulmans du monde entier. Et là, ce serait un conflit d’une tout autre ampleur.
Cela m’amène à la question suivante : quelle est l’évolution de la société israélienne ?
Tout le monde peut l’observer : le gouvernement actuel est le plus à droite, voire à l’extrême droite, depuis la création de l’État d’Israël. Il n’y a que votre président pour ne pas s’en être aperçu : son discours d’amour pour Israël, lors de sa visite, était réellement honteux, de même que ses premières déclarations lors de l’agression contre Gaza.
Au moment de cette agression, tu as parlé de « fascisation du régime ». N’est ce pas un peu excessif ?
Je persiste ! Quand un gouvernement pratique une politique pour museler l’opposition, quand il fait voter des lois racistes, liberticides, n’est-ce pas le début d’un processus qui vise à terroriser la population ? La brutalité de l’ambiance créée, plus l’apparition de petits groupes fascistes et de milices, ce n’est pas comme cela que ça a commencé en d’autres temps et d’autres lieux ?
Et la gauche dans tout ça ?
La droite est à l’offensive, structurée, réaffirmant sans état d’âme son projet colonial. La gauche, désarçonnée, est hors jeu. Pour prendre une image : nous n’étions que 3 000 à manifester au moment de l’agression contre Gaza, ce qui est très peu. Mais on pourrait dire que nous étions 100 000 de plus si l’on compte celles et ceux qui quittent aujourd’hui le pays parce qu’ils ne supportent plus l’évolution de cette société. Ce sont les jeunes, souvent les plus diplômés, qui cherchent à partir. Beaucoup d’Israéliens aujourd’hui se font faire des passeports pour avoir une double nationalité.
En France, il y a beaucoup de reportages sur les départs des juifs français en Israël…
Peut-être, mais ce qu’on oublie de dire, c’est qu’au bout d’un an, la moitié environ repart !
À tes yeux, quel est le sens de la proposition du gouvernement d’une loi visant à instaurer Israël comme « État–nation du peuple juif » ?
Une provocation supplémentaire ! Et une surenchère de plus dans la réaffirmation des discriminations envers les Palestiniens d’Israël. Une autre façon de dire au peuple palestinien : oubliez la question des réfugiés.
Pour changer de registre, la France et d’autres membres de l’Europe s’apprêtent à reconnaître l’État palestinien. Qu’en penses tu ?
La rage que cela provoque dans la classe politique israélienne fait plaisir ! Mais au-delà, il faut l’interpréter comme un coup de semonce donné par la communauté internationale envers un allié qui devient incontrôlé et commence à irriter même « l’establishment » américain. Celui-ci a besoin dans sa coalition contre Daesh du soutien des gouvernements arabes, et les prises de position de Nethanyaou deviennent encombrantes. Alors tout ce qui est mauvais pour le gouvernement israélien est bon à prendre ! Mais ce n’est qu’un gain symbolique, cela ne changera pas la vie des Palestiniens, la réalité de l’occupation, de la colonisation. Un État qui n’a pas de souveraineté, qui ne contrôle pas ses frontières, n’est pas un État, juste un bantoustan !
Et pour imposer la reconnaissance des droits des Palestiniens à Israël (dont le projet, inchangé depuis sa création – faut il le rappeler –, reste la colonisation de plus de territoire possible), il faudra un bouleversement tout autre du rapport de forces à l’échelle internationale. Il faudra une réelle volonté politique de la communauté internationale de s’opposer réellement à la politique israélienne, au-delà du geste symbolique…
Une remarque encore : il faut toute l’arrogance israélienne pour reprocher aux Palestiniens de proclamer unilatéralement un État. Que je sache, l’occupation, la création même de l’État d’Israël, n’a pas été une décision conjointe !
 Alors que faire ?
Cela se résume en trois mots : Boycott-Désinvestissement-Sanctions (BDS). Quand les États ont failli, c’est aux sociétés civiles de prendre le relais ! Il faut boycotter, isoler par tous les moyens cet État voyou. D’ailleurs, cette campagne inquiète le gouvernement israélien qui vient de faire voter une loi criminalisant le soutien au boycott en Israël même. Amplifier cette campagne, en faire l’axe central de la solidarité, est aujourd’hui, à mes yeux, ce qui doit être la priorité du mouvement de solidarité avec le peuple palestinien. J’ai envie de vous dire : boycottez-nous, c’est le meilleur service que vous pouvez rendre à celles et ceux qui en Israël se battent pour que justice soit rendue au peuple palestinien.

Pas d'extradition en Espagne des prisonniers politiques basques

Albisu et Maixol Iparragire, militants d'ETA, ont été arrêtés en France en 2004. Ils avaient, et ont toujours, un enfant, né en France. A Toulouse. Depuis 2012, Mikal et Maixol sont emprisonnés dans le même centre pénitentiaire, à Réau à 40 kilomètre de Paris. Ils peuvent donc, ensemble, , se voir ensemble, avec leur fils, dans le cadre de parloirs communs et, le temps d'un week end, dans le cadre d'une Unité de Vie Familiale. Un appartement, à l'intérieur de la prison, permettant aux familles de se reconstruire.
En septembre 2014 leur fils a choisi de faire des études universitaires ( philisophie) à la Sorbonne. Pour pouvoir être au plus près de ses parents, 40 kilomètres.
Une directive europèénne de 2008, entérinée par la France et validée recemment par l'Espagne, stipule que les prisonniers originaires de l'Union européènne doivent accomplir leur peine dans leur pays d'origine.
Cette directive européènne, si elle est appliquée à la lettre ( la presse espagnole  l'affirme), va se traduire par l'extradition, en Espagne, de Mikel et Maixol. Le tarif habituel est " Séville" ( jute à côté du Pays basque). Leur fils sera alors à 2000 kilomètres de ses parents. Et si d'aventure il résolvait le problème du coùt d'un tel transport, il ne pourrait les voir que lors de parloirs d'une demi- heure ( deux par semaine). C'est ainsi, en Espagne, où les Unités de Vie Familiale n'existe pas.
Un regroupement familial existant aujourd'hui, de fait, serait sans doute détruit à jamais.
Aussi, nous vous demandons de ne pas transférer Mikel et Maixol en Espagne, ou, du moins, de ne pas cautionner celà.
Nous vous demandons, bien évidemment, de faire de même pour tous les prisonniers politiques, basques ou non, qui seraient dans le même cas de figure que Mikel et Maixol.
Madame Taubira, vous qui avez victime d'injures raciales ignobles, vous avez eu le courage de cette loi sur la mariage pour tous, vous vous êtes insurgée contre le meurtre d'un enfant noir aux USA...nous n'osons pas croire que, informée ' et vous l'êtes par la présente) vous puissiez détruire une famille.
Pétition à envoyer à
Madame Christine Taubira
Ministère de la justice
75 place Vendôme
75 042 Paris cedex 01

Merci d'envoyer un double à: Editions Libertaires
15 allée de l'angle
Chaucre
17190  St Georges d'Oléron
Tel: 05 46 76 73 10

"Le petit bonhomme"

sur une chanson de Felix Leclercq (du Canada pas de Hollande)

> > http://youtu.be/VnPALs2q1YI (copié-collé)

ATHÈNES SUR UN VOLCAN (texte et photos)



URGENT : INFOS IMPORTANTES SUR LA SITUATION EN GRÈCE !

(alors que les médias européens n'en parlent pas du tout, n'hésitez pas à faire circuler, merci de votre soutien)

Texte et photos envoyés par Yannis Youlountas depuis Athènes, cette nuit (5-6 décembre 2014)

Résumé : 
> Les manifestations, émeutes et occupations se multiplient chaque jour à Athènes et ailleurs en Grèce, depuis fin novembre. Notamment à cause de la tyrannie du pouvoir à l'égard de Nikos Romanos, jeune prisonnier de 21 ans en grève de la faim, privé de la possibilité d'étudier et particulièrement maltraité. Nikos est, de surcroît, l'ami d'enfance d'Alexis Grigoropoulos, tué le 6 décembre 2008, à l'âge de 15 ans, par un policier dans le quartier d'Exarcheia à Athènes, ce qui avait provoqué un mois d'émeutes retentissantes dans toute la Grèce. Nikos est naturellement devenu le nouveau symbole de toutes les violences actuellement subies par la population, mais aussi du profond désir de lutter, quelle que soit la forme, et de refuser la torpeur et la résignation.

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Photos 
> envoyées par Yannis Youlountas depuis Athènes (Yannis est membre de l'assemblée de réoccupation de l'Ecole Polytechnique et tourne également, caméra au poing, au cœur des événements, avec l'appui des insurgés).
http://nevivonspluscommedesesclaves.net/spip.php?article54

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Texte
http://nevivonspluscommedesesclaves.net/spip.php?article55

ATHÈNES SUR UN VOLCAN

Six ans après le mois de décembre 2008, l'atmosphère est à nouveau insurrectionnelle à Athènes et ailleurs en Grèce. Tous les ingrédients sont réunis pour faire du mois de décembre 2014, peut-être, un grand moment historique. Jusqu'à quel point et à quelles conditions ?

> Depuis la fin du mois de novembre, les manifestations, émeutes, actions ciblées et occupations se multiplient un peu partout en Grèce (dans le silence total des medias européens, plus que jamais des merdias à boycotter ou à bloquer et occuper). La cause principale est la situation du jeune prisonnier anarchiste de 21 ans, Nikos Romanos, qui est devenu un symbole de toutes les violences actuellement subies par la population, mais aussi du profond désir de lutter, quelle que soit la forme, et de refuser la torpeur et la résignation.

Nikos, l'ami d'Alexis Grigoropoulos, symbole des émeutes de 2008 

> Nikos est l'ami d'enfance d'Alexis Grigoropoulos, assassiné à l'âge de 15 ans par un policier dans le quartier d'Exarcheia à Athènes. Un quartier réputé pour ses révoltes historiques et ses nombreuses initiatives autogestionnaires et solidaires. Un quartier dans lequel la liberté, l'égalité et la fraternité ne sont pas des mots jetés à l'abandon au frontispice de monuments publics glacés de marbre. Nikos a vu son ami mourir dans ses bras le soir du 6 décembre 2008. Profondément révolté, il s'est par la suite engagé dans l'anarchisme révolutionnaire et a dévalisé une banque pour financer son groupe qualifié de terroriste par le pouvoir. Après avoir été torturé, notamment au visage, lors de son arrestation, il a finalement réussi à obtenir son bac en prison, mais se voit aujourd'hui refuser la possibilité de poursuivre ses études. C'est pourquoi, depuis le 10 novembre dernier, Nikos est en grève de la faim. Son état s'est progressivement dégradé, notamment au niveau cardiaque, malgré ses 21 ans, et il a été transféré sous haute surveillance à l'hôpital Gennimatas d'Athènes devant lequel manifestent régulièrement des milliers de personnes qui parviennent parfois à dialoguer avec lui à travers les grilles de sa fenêtre (voir la première photo de l'article connexe, dans la même rubrique). En solidarité avec Nikos, un autre prisonnier politique, Yannis Michailidis, s'est mis en grève de la faim le 17 novembre au Pirée, suivi par deux autres, Andreas Dimitris Bourzoukos et Dimitris Politis, depuis le 1er décembre. Le gouvernement grec vient de confirmer son refus de permettre à Nikos de poursuivre ses études et préfère le laisser mourir, non sans faire preuve d'ironie. Des petites phrases assassines et provocatrices qui ne font qu'augmenter la colère populaire et les nombreuses protestations des organisations anarchistes et antiautoritaires jusqu'à celles de SYRIZA, principal parti de la gauche critique, qui est annoncé vainqueur des prochains élections en Grèce. Bref, le contexte politique est particulièrement tendu, à tous points de vue.

L'Ecole Polytechnique, symbole de la chute de la dictature des Colonels 

> Dans cette ambiance de fin de règne, parmi d'autres initiatives solidaires, l'Ecole Polytechnique est à nouveau occupée depuis le premier décembre, 41 ans après avoir défié avec succès la Dictature des Colonels en novembre 1973, au cours d'une occupation similaire pour défendre une radio libre qui s'opposait au régime autoritaire. Les CRS suréquipés viennent d'échouer par deux fois dans leurs tentatives de nous déloger, notamment le 2 décembre au soir, à la fin d'une manifestation fleuve qui s'est terminé avec plusieurs banques dégradées ou brûlées. Parmi d'autres obstacles de circonstance, un bus a même été transformé en barricade incandescente sur l'avenue Stournari, à Exarcheia (voir les photos dans l'article connexe), et les affrontements ont duré une bonne partie de la nuit. Douze insurgés arrêtés ont été violemment frappés, au point que trois d'entre eux souffrent de fractures du crâne. L'occupation de l'Ecole Polytechnique n'a pas cédé, malgré le deversement de quantités énormes de gaz lacrymogène depuis l'extérieur, tel du napalm sur toute la zone devenue une zone à défendre. Une ZAD jumelée, ces dernières heures, avec d'autres ZAD dans le monde, notamment celles de NDDL et du Testet en France qui ont rapidement transmis leur soutien fraternel, ainsi que de nombreuses personnes et organisations de France et d'ailleurs (soutiens que j'ai tous affichés sur l'un de nos murs et annoncés en assemblée à tous les compagnons et camarades).

> Ce soir-là, alors que la distribution solidaire de sérum, de mallox et de citrons battait son plein, j'ai remarqué plus de filles que jamais parmi les insurgés (voir la photo de « l'autre statue de la liberté » dans l'article connexe) et une diversité à tous les niveaux qui augure d'une ampleur et d'une radicalité sans précédent. J'ai vu et ressenti une détermination et une fraternité rarement rencontrées jusqu'ici, dans mes voyages en Grèce et ailleurs, là où l'humanité ne se résoud pas à vivre à genoux et tente, diversement, de se lever. J'ai vu la vie s'organiser autrement dès le lendemain et la chaleur des barricades se transformer en chaleur des cœurs parmi les occupants de l'Ecole Polytechnique et d'ailleurs.

Rien n'est fini, tout commence ! 

> Car durant ces dernières heures, les lieux d'occupations se sont multipliés, rappelant le processus de décembre 2008 qui avait amené la Grèce à connaître les émeutes sans doute les plus puissantes en Europe depuis plusieurs dizaines d'années (sans toutefois parvenir à renverser un pouvoir qui s'était finalement maintenu de justesse, notamment en distillant la peur et la désinformation dans les médias). Des occupations de bâtiments publics et de groupes financiers, de chaînes de télévision et de radios, d'universités et de mairies, depuis Thessalonique jusqu'à Héraklion. Des occupations toujours plus nombreuses, ainsi commentées par Yannis Michailidis dans son dernier communiqué de gréviste de la faim, très relayé sur Internet : « c'est ce qui brise la solitude de ma cellule et me fait sourire, parce que la nuit de mardi [2 décembre], je n'étais pas prisonnier, j'étais parmi vous et je sentais la chaleur des barricades brûlantes ». Avant de conclure avec une phrase rappelant le titre du dernier livre de Raoul Vaneigem : « Rien n'est fini, tout commence ! »

Une émotion immense 

> Parmi les événements qui m'ont également marqué ces jours-ci, certaines assemblées de collectifs ont montré à quel point la tension est à son comble. Notamment celle de l'occupation de l'Ecole Polytechnique dans la soirée puis toute la nuit du 3 au 4 décembre. Une assemblée qui a duré plus de 9 heures, jusqu'à 5h30 du matin. Certes, quelques divergences ont justifié cette durée jusqu'au consensus finalement trouvé au petit matin et je ne rentrerai évidemment pas dans les détails de ce qui s'est dit, notamment pour ce qui est des projets en cours. Mais je peux témoigner d'une atmosphère électrique ponctuée de longs silences qui en disent long. Je peux vous dire également que le grand amphi de l'Ecole Polytechnique était, une fois de plus, plein à craquer, avec des compagnons et des camarades debout et assis un peu partout, devant des murs fraichement repeints de graffitis. Je peux vous dire que la présence du papa de Nikos Romanos, assis au milieu de la salle, avec sa chevelure longue et grise et son regard profond et digne, ne pouvait que contribuer à une émotion déjà immense, alors que son fils se rapproche chaque jour d'une mort certaine.

« Agir comme si notre propre vie était en jeu… » 

> Le stress et la nervosité, la gravité du moment, l'importance des enjeux, faisaient fumer presque tout le monde beaucoup plus qu'à l'habitude, au point que j'en étais presque à regretter l'irritation causée par les gazs lacrymogènes dans les rues alentours. Parmi les paroles qui ont résoné : « ce n'est plus l'heure de mettre la pression, mais de rentrer en insurrection » ou encore des appels à « agir comme si notre propre vie était en jeu, car en vérité, c'est bien le cas pour nous tous qui vivons comme damnés, comme des esclaves, comme des lâches » ; « il faut retrouver pleinement confiance en nous-mêmes pour parvenir à redonner partout confiance aux gens et, en particulier, pour rassembler les laissés pour compte qui devraient être les premiers à descendre dans la rue, au lieu d'attendre que la libération vienne du ciel ». J'ai aussi parfois entendu des paroles jusqu'au boutistes que je ne préciserai pas ici, mais qui témoignent bien du ras-le-bol immense qui traverse une grande partie de la population et la conduit à tout envisager pour se libérer des tyrans du XXIème siècle.

Des tags à la mémoire de Rémi Fraisse 

> J'ai vu un ancien de 1973 avoir les larmes aux yeux et songer que nous vivons peut-être un autre moment historique. J'ai lu d'innombrables tags en soutien à la grève de la faim de Nikos Romanos, mais aussi à la mémoire de Rémi Fraisse, tué par le bras armé du pouvoir sur la ZAD du Testet.

> Cette nuit encore, à la veille du 6 décembre très attendu, avec une grande inquiétude par les uns et avec un profond désir par les autres, le quartier d'Exarcheia est encerclé par les camions de CRS (MAT) et les voltigeurs (Delta, Dias). Plusieurs rues sont barrées. On ne peut entrer et sortir d'Exarcheia que par certaines avenues, plutôt larges et très surveillées. La situation prend des allures de guerre civile et rappelle certaines régions du monde. A l'intérieur du quartier, comme dans beaucoup d'autres coins d'Athènes, la musique résonne dans le soir qui tombe : du rock, du punk, du rap, du reggae, des vieux chants de lutte. Dans l'Ecole Polytechnique, on a même installé deux immenses enceintes du côté de l'avenue Patission et on balance ces musiques pour le plus grand bonheur des passants qui nous soutiennent et lèvent parfois le poing ou le V de la victoire tant désirée. D'autres baissent la tête et ne veulent pas y croire, ne veulent pas voir, ne veulent pas savoir, murés dans la prison d'une existence absurde et pauvre à mourir d'ennui, si ce n'est de faim.

Le spectacle d'un monde à réinventer 

> Ici, ça dépave, ça débat, ça écrit sur les murs et sur les corps, ça chante, ça s'organise. La fête a déjà commencé ! Certes, elle est encore modeste et incertaine, mais une nouvelle page de l'histoire des luttes est peut-être en train de s'écrire à Athènes et au-delà. Une nouvelle page qui ne pourra s'écrire qu'en sortant de chez soi, par-delà les écrans, les « j'aime » des réseaux sociaux et le spectacle d'un monde tout entier à réinventer. Une nouvelle page qui ne pourra s'écrire qu'ensemble, en se débarrassant de la peur, du pessimisme et de la résignation.

> Rester assis, c'est se mettre à genoux.

Yannis Youlountas
membre de l'assemblée d'occupation de l'Ecole Polytechnique à Athènes

N'hésitez pas à faire circuler. Merci de votre soutien.
http://nevivonspluscommedesesclaves.net/spip.php?article55 (texte)
http://nevivonspluscommedesesclaves.net/spip.php?article54 (photos)

Crèches de Noël : Polémiques, tensions, buzz médiatique : L’Eglise catholique à la manœuvre

Depuis trois jours, c’est l’affaire du siècle. La Libre Pensée a fait retirer, au nom de la loi du 9 décembre 1905 et du principe de laïcité, une crèche dans des bâtiments officiels de la République. Ici, c’est un Conseil général, ailleurs il s’agit de Mairies.

Alors que depuis de nombreuses années, la Libre Pensée défère devant les tribunaux administratifs les collectivités territoriales qui violent la laïcité en mettant des emblèmes religieux dans les bâtiments de la République et que les tribunaux exigent le respect de l’article 28 de la loi de 1905, et leur retrait des lieux publics,  il n’y avait d’habitude aucun écho médiatique à cela.

Mais là, visiblement l’Eglise catholique a décidé de faire un « coup » médiatique et les médias aux ordres et les politiciens confits dans l’eau bénite ont relayé une campagne où l’on présente la Libre Pensée comme des « voleurs de Noël ». Devant une telle manipulation, la Libre Pensée a tenu à rappeler que c’est l’Eglise catholique, le 23 décembre 1951, sur le parvis de la cathédrale de Dijon, qui a brûlé en effigie le Père Noël (voir sur « www.fnlp.fr») pour cause de paganisme.

Pourquoi un tel acharnement ?

Depuis le 15 août 2012, l’Episcopat a décidé de descendre dans l’arène publique. Les Evêques ont appelé leurs ouailles à battre le pavé contre le mariage pour tous, contre la PMA, la GPA, la recherche scientifique sur les embryons et le droit de mourir dans la dignité. Attachés à un ordre ancien et à la nostalgie d’un Vieux-Monde qui sent le moisi, le rance et l’encens, les Prélats appellent à une Reconquista contre la Gueuse.

C’est la raison de l’affaire dite des « crèches de Noël ». En Espagne, dans la Sierra Guadarrama, les mitrés hispaniques sont en train d’ériger 1 300 croix  catholiques, au nom des « 1 300 martyrs du franquisme assassinés par les odieux républicains ». C’est la même croisade pour reconquérir l’espace public.

Ces crèches chrétiennes sont une provocation politique contre le caractère laïque de la République.
C’est une affaire montée de toutes pièces pour tenter de sacraliser le christianisme dans le pays, alors qu’il est en pleine perte de vitesse. Les Eglises se vident, alors il faut occuper le terrain dans les bâtiments de la République.

Pour la Libre Pensée, les choses sont simples. La liberté de conscience fait que chacun fait ce qu’il veut, où il veut. Mais dans les locaux de la République, c’est la neutralité. La crèche de la Nativité est chrétienne, c’est donc un symbole religieux. Le bébé dans le berceau s’appelleJésus-Christ, pas Mohammed. Le sapin, les boules, les guirlandes, les étoiles n’ont aucun caractère religieux. Ils viennent du vieux fond païen de notre pays (4 000 ans, excusez du peu !)

Les mêmes qui applaudissent agenouillés devant la crèche dans les bâtiments publics crieraient aux orfraies s’il s’agissait d’un symbole juif ou musulman. C’est la laïcité à géométrie variable. La République est laïque et pas chrétienne, n’en déplaisent aux manieurs d’encensoirs.

Ce n’est pas encore les rois, mais il a tiré la fève :
Philippe de Villiers !

Dans le florilège de la stupidité réactionnaire et bondieusarde, le Puy-du-Fou est au top niveau. Qu’on en juge. Confronté à David Gozlan, Secrétaire général de la Libre Pensée, voici ses arguties : « On va interdire les sonneries de cloches, avec la Libre Pensée, qui n’est pas une pensé libre – je le dis au passage à votre interlocuteur – une pensée secrète pour détruire le christianisme et en même temps, on installe, on islamise la France sans que personne ne dise rien ! C’est ça qui me scandalise ! En fait, c’est simple : ce n’est pas une question de loi, c’est beaucoup plus grave que ça. C’est notre identité et vous le savez très bien, c’est notre patrimoine, ce sont nos enfances, c’est notre passé, c’est notre histoire, c’est tout ce qui fait l’âme de la France. A vouloir détruire l’âme de la France, on fait courir un vent de folie, qui est un vent de folie qui conduira à des conséquences de régimes totalitaires.

J’appelle à la résistance et si j’étais Président du Conseil général de la Vendée aujourd’hui, je n’aurais pas démonté cette crèche, j’aurais affirmé la nécessité de résister à des gestes totalitaires !

Moi, j’ai une seule chose à vous dire, c’est que en ce moment, personne ne dit ça sur votre antenne, moi je vais le dire et je n’ai pas peur des Francs-mac, moi, ça m’a jamais fait peur et d’ailleurs l’œuvre du Puy du Fou est une œuvre de chrétienté qui fait rayonner l’âme de la France. Ce qui est en train de se passer en ce moment, c’est l’islamisation progressive de la France. Partout. Partout les digues lâchent. La vague continue. On est en train de vivre un changement du peuplement, je pèse mes mots, et on est en train d’accepter en France, pour l’islam, ce que maintenant on se met à refuser à la chrétienté. Nous étions une société de chrétienté, or nous allons devenir une république islamique dans 30 ans. Ce sont les démographes qui parlent. Alors évidemment, la Libre Pensée, c’est ce qu’elle veut secrètement, parce que comme on dit dans l’évangile « on ne met pas une lampe sous le boisseau », vous vous cachez Monsieur de la Libre Pensée ! Votre but secret, c’est de détruire l’identité de la France ! Heureusement aujourd’hui en France, il va y avoir des auditeurs qui vont réagir à mon propos ! Il y a des millions de français qui en ont ras le bol que l’on détruise l’identité de la France et moi je suis un des porte-parole de cette France-là ! »

Le ci-devant de Villiers a un véritable problème avec l’Histoire, il ne s’est pas encore aperçu que depuis 1789, il y a eu la Révolution et ensuite la République.  Il n’est pas descendu de cheval depuis Poitiers en 732. Sus aux Maures et aux Sarrazins !

Et dans son délire, il cite Mozart (horreur : un Franc-Maçon !) et Victor Hugo (damnation : un libre penseur !). Victor Hugo, qu’il devrait lire quand il disait : « Ce que je veux : l’Etat chez lui, l’Eglise chez elle ». C’est tout simplement ce que demande la Libre Pensée.

Philippe de Villiers et Robert Ménard en appellent à la résistance et au refus des décisions des tribunaux. Comment, quelqu’un en charge de l’autorité publique, peut-il ainsi bafouer la loi ? Que diront-ils demain quand des personnes feront des incivilités, eux qui en appellent à ne pas respecter la loi ?

Au cours des nombreux débats médiatiques, David Gozlan s’est trouvé confronté à quasiment tout le panel des « leaders » politiques de l’extrême-droite au PS. Tous, sans exception aucune, ont repris l’argumentaire de l’Eglise catholique, sur les racines chrétiennes, sur la non-importance de la crèche, le bonheur que cela apporte, etc… Un seul discours, mais plusieurs haut-parleurs. Et tous sont connus pour avoir soutenu l’interdiction du voile islamique dans la rue.

Il est à noter aussi qu’au début l’Eglise catholique a envoyé débattre des ecclésiastiques et qu’ensuite ce furent des « politiques » qui furent envoyés au front, tous des Gens d’Eglise à des degrés différents. Tant il est vrai qu’il y a toujours plusieurs demeures dans la maison du Père.

Florian Philippot, Stéphane Ravier, Nadine Morano, Thierry Mariani, Philippe de Villiers, Christine Boutin, Jean-Christophe Lagarde, Jean Glavany, Malek Boutih, Julien Dray :
Tous derrière le petit Jésus dans la République et tous contre le voile islamique !
Que voilà des vrais laïques !


La Libre Pensée le dit haut et fort :
La République est une et indivisible :
La laïcité aussi !
Respect de la loi de 1905 !