par Frédéric
Lordon, 14 janvier 2020
Quelle « violence légitime » ?
Ils auront
matraqué des personnes âgées frappé des handicapés en chaise
roulante, tiré au LBD sur des ados, agenouillé des classes
entières, lancé des grenades à l’intérieur des appartements,
tué une vieille dame — et puis bien sûr visé les yeux, lancé
les GLI-F4 en cloche, arraché des mains. Ils auront tout fait — la
police de Macron. Maintenant la haine de la population est sortie, et
elle ne rentrera pas de sitôt dans le tube. Sa légitimité est
constituée, entière, incontestable. La population hait la police et
personne ne pourra lui dire qu’elle n’a pas raison.
Les violents dans les institutions de la violence
Qu’on
trouve surreprésentés des individus violents à l’embauche des
institutions de la violence, il ne devrait y avoir là rien pour
étonner. Toute la question est celle de savoir ce que les
institutions de la violence font de leurs violents. La combinaison de
la nullité burlesque de Castaner et de la complète étrangeté de
Macron au monde réel, associées à la situation du régime ne
tenant plus que par la force armée, ont conduit à tout lâcher là
où il était impérieux de tout tenir. C’est que la prérogative
exorbitante d’exercer la violence ne peut aller sans la
contrepartie d’une responsabilité et d’une surveillance
exorbitantes. Si le macronisme restera dans l’histoire comme la
bascule dans l’État policier, c’est parce qu’à la prérogative
exorbitante, il aura au contraire ajouté les autorisations
exorbitantes : faites
ce que vous voulez.
Il
faut se représenter la décharge biochimique qu’entraîne dans des
têtes violentes cette parole à peine murmurée : faites ce que
vous voulez. C’est la décharge de la pulsion à laquelle d’un
coup il est donné libre cours. On ne reprend pas facilement le
bouillonnement sadique après l’avoir libéré. Chez les sujets
dont nous parlons, l’expérience de la licence absolue, comme
un Salò à
ciel ouvert, licence de brutaliser, d’insulter, d’humilier,
d’exercer par la violence un pouvoir unilatéral sans borne,
puisque l’impunité est devenue une garantie implicite, cette
expérience est de celle dont on ne revient pas facilement. La police
est partie, et maintenant il va falloir la rattraper. Le régime
avait l’usage mais aussi la garde d’individus potentiellement
dangereux, dont il exploitait à ses fins les pulsions ;
dans la panique pour sa propre survie, il a tout lâché ;
il a maintenant abandonné la société politique à un corps
étranger, irrésistiblement pris dans un devenir-milice, qui ne vit
plus que d’une vie totalement autocentrée, et totalement
préoccupée de ses assouvissements. « Maintenant
sous Macron, on a tous les droits ».
La police n’a pas besoin de circulaires pour mesurer l’ampleur
de ses
autorisations.
On
dit que la répétition des week-ends jaunes « épuise »
les policiers, « les
prive de leur vie de famille ».
Pour certains au moins c’est une énorme blague. Un article
du Canard
Enchaîné début
2019 avait mieux restitué la disposition d’esprit policière à
l’approche des actes « gilets
jaunes » : « C’est
la fête du slip ».
Chez les baqueux, on
pousse des cris de jungle à
chaque impact de LBD. Partout ça jouit à en hurler de bonheur. On
pense à ce CRS interviewé dans La
Série Documentaire de
France Culture consacrée
à la police : « Je
suis chanceux, chanceux, vous ne pouvez pas savoir à quel point je
remercie, tous les jours en allant au travail, je dis merci, merci,
merci ».
La jouissance a saisi les corps : on se souvient du bonheur
physique d’un des CRS gazeurs de jeunes écolos sur le pont Sully
cet été, impérial, poivreuse en main, parfaite décontraction,
totale certitude d’un pouvoir sans limite. C’est le même corps
exultant de violence qui jouit à littéralement détruire une femme
syndicaliste dans la manifestation du 9 janvier.
Mais
l’on sait à quel niveau l’on est descendu quand c’est le moins
pire qui est presque le pire : ainsi de ce croche-patte d’un
CRS à une femme à peine arrêtée, sans doute objectivement moins
violent qu’un œil crevé, et pourtant tréfonds d’ignominie qui
dit tout de la position psychique présente de la police. Et de sa
déchéance morale plus encore : ces gens sont sans honneur,
sans dignité, sans face. Ils sont hors-tout, et c’est à eux qu’on
a donné les armes. Cet été, aux Rencontres d’Eymoutiers, un
« gilet
jaune »,
la tranquillité de la classe moyenne en personne, racontait comment,
pour protéger sa femme de la violence policière, il s’était
interposé, donc retrouvé
en garde-à-vue, et entendu dire : « Elle
est belle ta fille, il ne faudrait pas qu’il lui arrive quelque
chose ».
La police française est dans la fange.
L’effondrement des forces de rappel
L’est-elle
toute ?
On veut bien croire qu’il reste dans l’institution quelques
atterrés de l’intérieur, mais à l’évidence minoritaires,
et, à
de rarissimes exceptions près,
réduits au silence. C’est que la catastrophe se mesure maintenant
à ce qu’on entend « dans
les étages »,
quand on remonte dans la hiérarchie, là où normalement devraient
se faire connaître les forces de rappel. Et où tout a cédé
identiquement. On pense notamment, si l’on peut appeler ça « les
étages »…,
à ces syndicalistes policiers, illustration parfaite de la vie
autocentrée de ce corps, coupé de tout le reste de la société,
muré dans le déni massif et l’autojustification acharnée, à
l’image du secrétaire d’Unité SGP Police FO qui, après l’acte
« gilet
jaune »
du 11 février où un manifestant (de plus) avait eu une main
arrachée avait eu pour
tout commentaire : « J’ai
envie de dire, c’est bien fait pour sa gueule ».
On pense aussi à ces syndicalistes qui, sur les réseaux sociaux,
font ouvertement la chasse aux journalistes qui rendent compte de
leurs exactions, Gaspard Glanz et Taha Bouhafs entre autres,
pionniers les plus courageux et les plus exposés, mais sans que la
vindicte policière ne s’arrête désormais aux « journalistes
indépendants »
(en fait des journalistes tout court), puisqu’elle s’en prend
maintenant tout aussi agressivement aux journalistes de la presse
mainstream.
Voilà
pour le « premier
étage ».
Mais plus on monte, moins on trouve ce qu’on espérerait trouver.
C’est un commissaire qui a poussé à l’intervention où Steve a
trouvé la mort.
C’est un autre commissaire qui, avec le recul, ne voit rien à
redire à la manœuvre de ses troupes qui ont mis des dizaines de
lycéens à genoux mains sur la tête à Mantes-la-Jolie. L’image a
stupéfié le monde, mais lui ne voit aucun problème, et si c’était
à refaire… Voilà le message glaçant : ces gens sont prêts
à tout faire, et à tout refaire.
Il n’y a plus rien en eux, même pas la force de résonance
historique d’une image, qui puisse frayer son chemin jusqu’à un
reliquat de conscience morale, susciter la moindre reprise, un début
d’hésitation à l’ampleur symbolique des actes qu’ils
commandent, et endossent. Sur le terrain on jouit, dans les étages
on pense qu’on est bien fondé.
Tout le monde maintenant, sauf peut-être Anne Sinclair, connaît les propos du préfet Lallement.
Les
confirmations, comme la pourriture du poisson, venant toujours par la
tête, le plus effrayant est à situer tout en haut. Dans le bureau
du préfet de police de Paris, il y a un individu comme on n’en
avait pas vu depuis Papon — rappel que l’histoire ne passe jamais
complètement. L’opinion ne s’y trompe pas quand tous les faits,
gestes, attitudes, dégaines, rictus, sourires du préfet Lallement
la renvoient irrésistiblement à des évocations de l’Occupation,
c’est-à-dire génériquement à une époque sommet de la violence
pulsionnelle d’institution. Le sentiment de licence est tel que
l’usuelle limitation de l’expression au registre corporel,
protectrice puisqu’on ne peut rien lui faire dire formellement,
a cédé à son tour, et livré passage à l’explicite : « nous
ne sommes pas dans le même camp », « les
partis contestataires ».
Tout le monde maintenant, sauf peut-être Anne Sinclair, connaît les
propos du préfet Lallement. Là où d’habitude c’est le black
bloc qui défonce, ici la ruine de la vitrine aura été
autoadministrée. En deux phrases confirmant tous les sourires
tordus, la fiction de « la
police gardienne de l’ordre républicain »
a volé en éclats.
Au
vrai, on ne sait plus trop quoi faire depuis longtemps de ces
signifiants, « république »,
« républicain »,
dont le seul usage résiduel pertinent est peut-être à trouver dans
le fait qu’ils demeurent, envers et contre tout, opératoires dans
certaines têtes, médiatiques notamment, où ils peuvent encore
faire levier pour prendre conscience, par différence, de l’état
actuel de la police : devenue milice hors de contrôle, elle a
logiquement cessé d’être « républicaine ».
Un préfet qui pense par « camps » et
traque les « partis
contestataires » est
tout ce qu’on veut sauf « la
république ».
Pour tous ceux qui continuent de croire à la fiction de la
« république »,
il devrait y avoir au moins là l’occasion formelle de constater ce
que le chef de la police a fait de leur idéal : un débris
piétiné dans un sourire à faire peur.
De la « violence légitime »…
Il
reste cependant une différence entre le « bas »
et le « haut ».
Si « en
bas »
on cogne en silence (ou bien par cris), « en
haut »,
on fait des phrases. Une surtout :
« le-monopole-de-la-violence-légitime ».
Tragique destin de l’œuvre de Max Weber, réduite à l’état de
grumeaux de pensée Sciences-Po, pathétiquement mâchonnés par des
hauts-fonctionnaires ou des éditocrates sans esprit. Par des hommes
politiques aussi, et pas des moindres — mais ils sortent souvent
des mêmes fermes d’élevage. De Lallement, Morvan (ex-DGPN),
Jullien (directrice IGPN) à Macron et Philippe (mais sans passer par
Castaner dont le grelot ne rend du son qu’agité au Macumba), c’est
la même idée obstinée, le même entêtement buté, dernier rempart
justificateur à quoi il faut impérativement tout accrocher pour que
tout ne sombre pas dans l’indignité pure.
« L’État
détient le monopole de la violence légitime ».
Il s’ensuit 1) que toute autre violence est illégitime et 2) que
la violence d’État n’est jamais illégitime — puisqu’elle
est légitime. On en est là de la « réflexion »…
Alors il ne peut pas y
avoir de « violence
policière »,
puisque la police est l’État
et que la violence d’État est légitime. Voilà le fond de
casserole incrusté, qui sert de pensée à ces individus.
On
peine pourtant à croire que quiconque puisse voir un argument
sérieux dans une pure pétition de principe, démonstration
entièrement circulaire qui présuppose ce à quoi elle veut aboutir.
Et qui, d’évidence, ne comprend rien à ce que c’est que la
légitimité. C’est que la légitimité n’est pas une propriété
substantielle, qui se transporterait dans le temps comme ça,
inaltérée, acquise une fois pour toute. La réalité est tout
autre : on est légitime… tant qu’on est reconnu comme
légitime. Tel est le fin mot de la légitimité : elle n’est
qu’un effet d’opinion, une circularité, certes, mais qui doit
être impérativement soutenue par la croyance collective — et pas
juste par un simple décret. Si bien que la légitimité ne dure que
ce que dure la reconnaissance. Et pas une seconde de plus. Si la
croyance collective est détruite, la légitimité est détruite à
son tour. Or les croyances et les opinions n’attendent pas les
délais réglementaires de cinq ans pour se réviser, elles évoluent
avec ce qu’elles ont sous les yeux. Et avec ce que le macronisme
leur a donné à voir en deux ans, c’est peu dire qu’elles sont
parties ailleurs.
Pendant
ce temps les hommes de pouvoir et leurs valets de pied intellectuels
continuent de tenir l’attribution électorale du pouvoir comme
l’unique brevet de légitimité, intangible, valable sans autre
condition pour la durée du terme. Le pouvoir — à l’image de sa
police — peut donc faire
ce qu’il veut, sans que sa « légitimité »
n’en souffre la moindre altération. Aussi toute contestation en
légitimité est-elle systématiquement écartée par l’argument
électoral : « il
a été élu dans les formes, il est légitime ».
Mais l’élection n’est qu’une procédure, l’un des éléments
seulement auxquels s’accroche la croyance en la légitimité — du
reste une procédure aux propriétés légitimatrices abyssalement
décroissantes, sauf dans l’esprit de la minorité de tête
d’épingle qui y croit encore. Et seuls des demi-débiles pour
chaînes d’information en continu peuvent s’entêter dans un
raisonnement aussi défectueux, du reste ridiculisé par l’histoire
— ou alors il faudra considérer comme illégitimes tous ceux qui
en Allemagne ont contesté le pouvoir du chancelier Hitler (au
passage : marche aussi pour ceux qui en Russie, contesteraient
celui de Poutine).
L’État
ne peut donc dire sa violence légitime… qu’à la condition de se
maintenir dans la reconnaissance comme légitime. Or ni le
gouvernement qui en ce moment incarne l’État, ni la police qui en
est le bras armé permanent mais désormais dévoyée au-delà de la
honte, ne peuvent plus soutenir cette prétention. Qui ne se suffit
pas d’une phrase sortie en bouillie d’un cours de Sciences-Po ni
même de la seule forme de l’élection, mais se rejuge en
permanence dans les têtes, à
des actes.
Qui est légitime ?
Les
fanatiques du « monopole
de la violence légitime »
vont bientôt avoir l’occasion de se rendre compte de leur erreur.
Car la croyance collective est en train de se déplacer. Y compris
dans ses composantes les plus inertes, les plus rivées à l’ordre,
les moins capables de révision : les médias mainstream. Le
Monde, l’organe
directeur des consciences de la bourgeoisie poseuse, avait commencé
depuis cet été à travailler sérieusement sur des cas de violences
policières — fort bien au demeurant. Avec une sage
lenteur, l’éditorial fait
accéder ces articles au stade de la généralité. Il aura tout de
même fallu une année entière pour que le-journal-de-référence
finisse par tomber les peaux de saucisson, et se montre à la hauteur
de son « devoir
d’informer »
— un an !
Et ceci en n’étant toujours pas capable d’articuler la
conclusion politique qui s’ensuit pourtant : en France, le
droit politique fondamental en quoi consiste de manifester dans la
sûreté a été détruit.
En France, il n’est plus possible de manifester sans mettre en
péril son intégrité physique, et même jusqu’à sa vie !
On attend toujours qu’un grand média soit capable de dire cet état
de fait accablant, qui ramène le gargarisme démocratique des
« élites »
à une bouffonnerie, et la prétention d’incarner « le
libéralisme »
contre « l’illibéralisme »
des Orban & co à un motif d’hilarité.
À
voir le tweet, lui aussi hilarant, d’Anne Sinclair, scandalisée
par la vidéo du croche-patte policier,
on prend, juste après avoir ri, vertigineusement conscience de
l’état de séparation sociologique dans lequel elle vit, et ses
semblables prescripteurs avec elle. « Cette
vidéo sur laquelle je tombe par hasard, si elle est authentique est
hallucinante et scandaleuse… ».
Il aura donc fallu « le
hasard », en
janvier 2020, pour
qu’Anne Sinclair entr’aperçoive ce dont la police est capable.
On en conclut que, depuis un an, un an d’éborgnements, de
mutilations, de matraquages, elle n’avait
rien vu.
L’éditorialiste du Monde sans
doute, lui non plus n’avait rien vu. Dans son cas, il aura
probablement fallu que ses journalistes, eux-mêmes secoués par
David Dufresne, aillent en manif « pour
voir »,
en reviennent effarés, et lui racontent, pour que l’idée commence
à faire son chemin dans son esprit, et débouche — au bout d’un
an. Alors on comprend comment marche « la
presse démocratique »,
et l’on comprend l’invisibilisation massive dont les violences
policières ont si longtemps fait l’objet. Ce que les médias ne
voient pas, cela n’existe pas — or, ils ne voyaient pas…
Mais
la force de frappe des réseaux sociaux, la ténacité de quelques
journalistes hors-système ont fini par faire craquer la carapace de
cécité et de silence. On « en
parle ».
Certes toujours sans en donner le sens politique déplié, ni en
tirer quelque conséquence — comme prendre la tête
d’une alarme, ainsi
qu’il reviendrait normalement à une presse un peu démocratique.
Mais « on
en parle ».
Et petit à petit les donneurs de leçons commencent à rejoindre
l’opinion commune — pour sa part, formée depuis décembre 2018,
et comme toujours bien en avance sur eux… Alors peut-être les
leçons données vont-elles changer de tonalité, de destinataire
aussi. Et (re)découvrir enfin, les avis atterrés des instances
internationales, pour qui il y a déjà un moment que la légitimité
de « la
violence légitime »
est sérieusement en question.
Pendant
ce temps, Macron continue son soliloque halluciné. « La
haine, la violence et l’irrespect, on a le droit de le faire dans
une dictature », phrase tout
à fait étonnante en soi, qu’il faudrait soumettre simultanément
à des linguistes et des politologues, dont il ne voit pas en tout
cas que, projectivement, elle ne parle que de lui, de son
gouvernement, de sa police et du régime dans lequel il est en train
de nous faire entrer. Avec la démolition
pure et simple du langage,
le renversement projectif est l’une des propriétés les plus
inconscientes et les plus systématiques de la langue macronienne.
Dont la vérité d’à peu près tous les énoncés peut être
restaurée par la simple opération de la mise sens dessus dessous.
Ainsi l’obsession pour les « radicalisés »
et la « radicalisation »
est-elle le reflet inversé d’un bloc de pouvoir qui, depuis ses
sommets gouvernementaux jusqu’à ses trolls, a franchi tous les
caps de la radicalisation — dont la rage à imposer au corps social
qui n’en veut pas une réforme entièrement taillée d’après les
intérêts de la finance n’est jamais que la dernière
illustration.
De
même la fixation sur le terrorisme externe est-elle devenue
l’opportunité d’un terrorisme interne — d’État. Un ancien
de la préfectorale, ayant eu à connaître des opérations de
maintien de l’ordre, était dans la rue le 9 janvier ;
interrogé par Arrêt
sur images,
c’est lui qui, entre autres sauvageries, a filmé le tir de LBD à
bout portant. On n’a pas exactement affaire à un ennemi des
institutions. Qui n’en raconte pas moins que, traumatisé par ce
qu’il a vu, il doit s’asseoir en pleurs sur le trottoir. Puis
livre le fin mot de l’affaire : « Le
but était de terroriser ».
Terrorisme extérieur, terrorisme intérieur…
C’est
qu’à un moment, il faut bien prendre les mots au sérieux, et les
décoller de leurs usages habituels où les pouvoirs aiment les
enfermer. « Sont
interdits les actes ou les menaces de violence dont le but principal
est de répandre la terreur parmi les populations
civiles », indiquent
à propos du terrorisme les protocoles additionnels de la Convention
de Genève. On cherche ce qui dans l’entreprise systématique menée à
grande échelle par la police et le gouvernement,
entreprise d’intimidation, d’effroi et de découragement par la
menace physique de l’exercice normal des droits politiques
fondamentaux ne tombe pas sous cette définition. Et pour tout dire,
on ne trouve pas. Qui sont les radicalisés ?
Qui sont les criminels ?
Qui sont ceux qui terrorisent ?
Et
qui est légitime ?
Frédéric
Lordon
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