mercredi 16 mars 2016

L'enfermement des « indésirables », une vieille tradition de la politique française !


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De la création du camp de Sangatte en 1999 à la « Jungle » d'aujourd'hui, cela fait plus de quinze ans que la situation de crise humanitaire perdure à Calais. Cette longueur devrait alarmer, mais, après tout, quoi de plus normal puisque les crises humanitaires ne sont que les conséquences des crises du capitalisme : durables !

Durables d'autant plus qu'aujourd'hui, il est devenu « ringard » de contester le capitalisme, horizon indépassable pour toutes les forces politiques de gauche comme de droite !
À les écouter, il s'agit au mieux d'humaniser un tant soit peu le capitalisme... pour qu'il dure justement, ma brave dame.
Donc, durables le capitalisme et ses conséquences :
  • Les guerres avec le cortège de villes bombardées, de populations affamées, gazées, violées, torturées, génocidées.
  • Les routes de l'exil butant contre les grillages, les palissades, les murs et les barbelés délimitant les enclos nationaux appelés pays.
  • Les camps d'accueil, de concentration, de rétention, d'internement généreusement offerts par les démocraties occidentales.
Les guerres se portent bien, Dieu merci !
Le monde est en flammes grâce aux bons soins des États-Marchands d'armes, dont la France serait deuxième exportateur au monde !
Souris belle jeunesse ! Ton avenir est dans une usine d’armements ou à porter uniforme et fusil mitrailleur dans la police ou dans l'armée ; en période de chômage, voilà quand même une bonne nouvelle, non ?
À Calais, plusieurs milliers de migrants s'entassent donc dans un bidonville après avoir échappé à la noyade et aux requins en Méditerranée, aux fachos en mal d'exercice et aux racketteurs de tous poils.
Avant la récente évacuation de la zone sud, ils étaient 6 000 hommes, femmes et enfants, s'égayant dans les flaques d'eau, discutant de la pluie et du beau temps autour de quelques robinets installés en plein air et mis à disposition gracieusement par l'administration.
La France est une terre d'asile, ne l'oublions pas ! Elle sait recevoir.
Déjà, un certain Albert Sarraut, ministre de l'Intérieur inaugurant le camp de concentration d'Argelès, en février 1939 expliquait aux journalistes :
« Ce camp ne sera pas un lieu pénitentiaire, mais un camp de concentration. Ce n'est pas la même chose. Les asilés qui y prendront séjour n'y resteront guère que le temps nécessaire pour préparer leur refoulement ou, sur leur option, leur libre passage de retour en Espagne. »
Ce camp d'Argelès, avec une bonne douzaine d'autres, allait accueillir plus d'un demi-million de réfugiés espagnols dans les conditions que l'on sait !
Les migrants, ces « asilés » d'aujourd'hui sont donc « en séjour » à Calais où depuis 2003 et les accords du Touquet, la ville fait office de « frontière franco-anglaise ». Situation ubuesque dans laquelle la France, signataire des accords de Schengen, sert de frontière à un État qui ne les a pas signés ! Autre absurdité : elle maintient sur son sol, par la force, des milliers de personnes qui veulent en sortir pour rejoindre l'Angleterre ; elle les maintient sur le territoire national sans leur offrir pour autant un minimum d'accueil puisqu'à terme son objectif est de s'en débarrasser !
D'où la logique des camps construits à minima !
Déjà, en 1939 le gouvernement français avait le même questionnement :
« Comment accueillir à moindre frais des “ populations indésirables ”, en “ surnombre dans l'économie nationale “, sachant qu'il est urgent de s'en débarrasser ? »
À l'époque, la solution fut la création de « Camps de travailleurs étrangers » remplaçant progressivement les camps de concentration. Ces « camps de la honte » coûtaient trop cher à la France !

Subsidiarité
Aujourd'hui comme hier, les conditions d'accueil faites aux migrants dans ces camps sont le fruit de décisions hautement politiques de l'État.
Aujourd'hui comme hier, l'amélioration des conditions d'accueil ne peut donc pas être de son fait.
Depuis quand celui qui enferme se préoccupe des conditions d'enfermement ?
Comme dans nos « démocraties modernes » l'État n'a plus mission de justice sociale, celle-ci est privatisée, confiée aux associations et organisations diverses.
C'est ce que l'on appelle la subsidiarité, tant réclamée par le Vatican !
Pourquoi voudriez-vous, par exemple, que l'État se préoccupe des individus sous-alimentés, ce qui serait faire preuve de justice, alors qu'il y a les restaus du cœur pour le remplacer et faire œuvre de charité et d'assistance !
A Calais, il y a des militants qui voudraient eux, plus de justice, qui luttent avec les migrants ; mais l'État n'aime pas les militants puisqu’il n'accepte que les actes de charité, pas ceux de justice ! Vous pigez ?
Un camp ne serait pas complet sans clôtures et sans flics pour le protéger, normal au prix que çà coûte le fil de fer !
Entre deux bastons, pour passer le temps les flics papotent avec leurs copains, à majorité fachos. Normal, dans un coin où le Front National dépasse les 50 % !
Bref, en dehors des flics, aucune administration, comme en 39 à Argelès et ailleurs !
Dans un lieu n'étant pas conçu pour être un vrai accueil, pourquoi la préfecture déléguerait-elle sur place des responsables administratifs ? Pourquoi faudrait-il que la Permanence d'Accès aux Soins de Santé (PASS) de l'hôpital de Calais mette les pieds dans le camp ?
Comment voulez-vous que l'Éducation nationale y installe une école ?
Humour ! A côté du camp, se trouve un ancien centre de loisirs appelé « Camp Jules Ferry », vous savez, le promoteur de l'école publique laïque et obligatoire et de l'expansion coloniale !
Humour encore ! Ce sont des « No borders » anglais, qui par les vidéos prises ont, paraît-il amené le Défenseur des Droits Dominique Baudis à s'émouvoir fin 2012 de « la situation des migrants dans le Calaisis, du harcèlement policier et des conditions d'accueil indignes...» auprès du « sinistre de l'Intérieur » Bernard Cazeneuve.
Jacques Toubon, successeur de Baudis, a même insisté sur « les difficultés d'accès aux droits fondamentaux des exilés » dans le bidonville de Calais.

L’État hors la loi
Le Bernard, il s'est rendu sur place avec le Manu. C'était l'été 2015, où il a fait particulièrement chaud, voire caniculaire et il y aura toujours des mauvaises langues pour dire que ce sont les odeurs incommodantes émanant du camp qui ont amené le Premier sinistre à y créer alors 1 500 places d'hébergement. D'autres osent affirmer que cela serait du à un certain « appel des 800 », signé par des personnalités du monde intellectuel et artistique, demandant un plan d'urgence ! D'autres encore ont eu le culot de dire que cette décision était liée à la condamnation de l'État et de la ville de Calais par le tribunal administratif, le 2 novembre 2015 !
Le tribunal donnait alors 48 heures à l'État pour procéder au recensement des mineurs isolés, pour installer des vraies latrines et suffisamment de points d'eau :
« Il appartient aux autorités publiques de veiller à ce que les droits les plus élémentaires des personnes, constitutifs de libertés fondamentales, soient garantis. »
Toujours est-il que le Bernard, a fait savoir à l'époque qu'il « n'avait pas le pouvoir ni le devoir d'installer des équipements de première nécessité » sur un site occupé illégalement, que « toute autre interprétation conduirait à la définition d'une obligation juridique pour l'État d'aménager les campements sauvages et les terrains occupés de manière illicite ».
Le ministre a rajouté que c'était plus convivial d'éparpiller les milliers de réfugiés, par petits groupes, dans des Centres de rétention administrative à travers le pays.
Ce à quoi, Madame Adeline Hazan, Contrôleur général des lieux de privation de liberté, a répondu :
« Il m'est rapporté que la plupart des arrêtés préfectoraux portant obligation de quitter le territoire... ne préciseraient plus le pays de destination vers lequel elles devraient être reconduites. Dans ces conditions, il y aurait lieu de s'interroger sur le bien-fondé de la rétention, et à fortiori, de celle d'un transfert. »
Notre « Bernard-national-socialiste » a su répondre à toutes ces monstrueuses accusations (si çà se trouve, payées par l'Étranger !) :
« Dans un contexte migratoire qui impose au plus haut niveau la sécurisation de la zone portuaire et les abords du tunnel sous la Manche, les services de l'État utilisent de manière rationnelle la vocation naturelle des centres de rétention... il s'agit d'un traitement global et coordonné d'une situation posant de graves difficultés de tous ordres et face à laquelle il est du devoir de l'État de prendre toutes ses responsabilités. »

Oui, l'enfermement des indésirables est bien un trait de la politique française, quel que soit le gouvernement. Demandez aux républicains espagnols, aux harkis, aux gitans et autres juifs qui ont goûté aux joies de l'hospitalité française dans les Camps de concentration sur les plages méditerranéennes, dans les camps de rétention et autres « jungles » !
« Il y avait des espèces de constructions en bois. Ce n'était pas des baraques mais des parois dressées face au vent... les habitations plus que rudimentaires étaient envahies de puces, les latrines étaient des estrades en bois au dessus de gros bidons que nous allions vider (à la mer) chaque matin en les transportant sur un brancard [...]. Les français nous ont humiliés !» (Matias ARRANZ, militant de l'UGT, interné au camp de Barcarès)
Un peu de patience, le temps n'est peut-être pas loin où réapparaîtra le type de circulaire ci-dessous, afin de régler le sort des « indésirables en surnombre dans l'économie nationale » ! Il ne restera alors plus qu'à créer comme en 1939 des « Groupements et Camps de Travailleurs Étrangers » permettant au patronat français de s'enrichir grâce à une main d'œuvre bon marché et docile.



« [Il faut] transformer cette masse inorganisée et passive que constituent les réfugiés en éléments utiles à la collectivité nationale. » circulaire du 5 mai 1939.


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