vendredi 17 juin 2016

Deux textes sur le racisme et le féminisme...toujours d'actualité !

Ça baigne pour les femmes… ou ça saigne ?

« … Je monte dans la voiture d’un ami. Inouï !
On m’en arrache violemment. Sept mecs (peut-être même pas barbus) me maltraitent, me jettent pas terre, m’arrachent mes vêtements et me violent. Plusieurs fois. Ben quoi, ça m’apprendra : ce mec, qui conduisait, c’était pas mon mari, il ne faisait même pas partie de ma famille. Lui aussi, d’ailleurs, a été maltraité.
Et il y a eu un procès. J’ai écopé de 90 coups de fouets et mes violeurs de un à cinq ans de prison. Faut dire que je l’avais bien cherché, me fourrer dans la voiture d’un « étranger ». Bon, ensuite il m’est venu à l’idée de raconter ça à une association des droits de l’homme. Alors là, je suis repassée en procès, car je n’aurais pas dû faire connaître mon histoire. Je viens donc d’être condamnée à nouveau, cette fois à six mois de prison et 200 coups de fouet. Le fouet, c’est pas marrant, d’ailleurs on en meurt après un certain nombre de coups ; ça décolle je ne sais quoi à l’intérieur, et on meurt.
Bien sûr, ça ne se passe pas ici, en France, mais en Arabie Saoudite, hier (texte que j’ai écrit en décembre 2007), et toujours aujourd’hui. Bien sûr. Et là-bas, comme au Pakistan, entre autres, le viol collectif est une punition… comme une autre, quoique théoriquement punie de la peine de mort en Arabie Saoudite.
Mais revenons ici. En 2006, 137 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint. Et la première semaine de décembre 2007, une gamine de 17 ans a accouché seule dans le garage de ses parents. Elle a mené à terme cette grossesse en la cachant à tout le monde. Et elle a tué le bébé à l’arrivée. Total, devant tant de misère, qu’est-ce qu’on fait, ici, en France : on l’a mise en prison. Ça lui apprendra sûrement !

Pour moi, j’ai le cœur qui saigne de savoir tout ça. »

Apatride, oui, j’aimerais plutôt, s’il fallait choisir.

Je m’appelle Marie Desbois. Desbois, c’est français ça. Et pourtant. En y regardant de plus près, mon p’pa il a trouvé que ce nom était d’origine allemande. Il en était plutôt fier : il admirait beaucoup les Allemands, car « mon vieux, ils sont disciplinés ! » Et pas qu’un peu ! Il en avait une expérience bien sentie, lui, ancien pensionnaire de Dachau. Bref, Dubois, c’est allemand.
Du côté de ma mère, on est aussi très français. De Sainte-Maure en Touraine on est. Mon frère, il est raciste, comme mes parents : « Les Noirs, y’en a des bons, mais les Arabes, sale race ! » Ma belle-sœur, elle est portugaise. Elle est rigolote. Mon frère lui a plu justement parce qu’elle croyait qu’il était maghrébin. C’est vrai quoi, ma mère a fait des enfants qui ressemblent tous à des Arabes, va comprendre. Poitiers, c’est vrai, n’est pas bien loin.
Ma mère… quand elle voyait un pauvre Noir, émigré, elle le foudroyait du regard, il n’aurait pas dû être là, dans la même rue qu’elle ; il salissait l’endroit en quelque sorte, lui qui était venu plutôt pour la nettoyer ! (voir Émile Ajar-Romain Gary) Car il ne suffit pas d’avoir eu une enfance très dure, avec un père alcoolique (boulanger, ça donne soif !) qui battait sa femme, un frère mort d’alcoolisme à 21 ans (boulanger…) pour réfléchir au pourquoi du comment. Pas du tout ! « Je n’ai pas eu la vie que j’aurais mérité », m’a-t-elle dit un jour. Non, c’est vrai, personne ne devrait voir sa mère se faire battre, se tuer au travail. Nous sommes tous victimes, pourrait-on dire. Mais une fois cela établi, qu’est-ce qu’on fait ?
Eh bien, faut faire avec et chercher à vivre et comprendre d’où viennent nos maux, et nos joies parfois. Ouais, acquérir la science de son malheur ne va pas de soi. C’est pourtant la seule solution pour grandir et s’épanouir un peu.
Revenons à nos moutons (les nôtres, races locales !). Alors mon identité aujourd’hui ? Je suis née ici, je vis ici. La France, Monsieur, je m’en tamponne. Ce qui importe ce sont : mes amis, mes voisins, ma famille (euh, non pas ma famille), mes collègues (enfin, quelques-uns), les gens que je croise, etc., tout ce monde dont je suis, auquel je participe, je fais avec, avec ou sans plaisir. Mais la France, cette abstraction… En cette sale période, dire que je suis française ? Non, je ne m’en vanterais pas ! Sale pays, oui. La liste est longue de ses méfaits, commis aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de ses frontières. Pays ou dirigeants de ce pays, est-ce différent ? Ce ne sont pas mes élus en tout cas, n’ayant jamais donné ma voix à aucun de ces assoiffés de pouvoir et de privilèges.
Apatride, oui, j’aimerais plutôt, s’il fallait choisir.

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