Claude Dagens, évêque d'Angoulême et Académicien, a lui aussi son avis sur le rédécoupage régional. Il le dit dans un texte publié dans le dernier numéro du bulletin diocésain Eglise d'Angoulême, qu'il a fait parvenir à CL. Comme la majorité des Charentais, il est lui aussi favorable à un rapprochement avec l'Aquitaine, à laquelle il arrive par des chemins tortueux et détournés, avec, au passage quelques piques pas vraiment catholiques, notamment en direction de Ségolène Royal, "qui vient de l’Est de la France et dont les références sont plutôt à Paris…"
Cela dit, Mgr Dagens n'a pas été prophète en son église puisque comme il le rappelle lui-même, la province ecclésiastique dont fait partie de la Charente, ressemble à la région dessinée par le président Hollande, avec le Poitou-Charentes et le Limousin, le Centre en moins.
On vous laisse le plaisir de suivre les méandres de son texte, que voici:
LES DONNÉES DE L’HISTOIRE
Il existe à Poitiers un Club Aliénor : les chefs d’entreprises qui le composent, dans le cadre d’une association engagée dans « le progrès du management », ont sans doute de la mémoire, ils se réfèrent à cette femme nommée Aliénor d’Aquitaine, devenue l’épouse du roi d’Angleterre Henri II Plantegenêt, qui eut une grande influence dans la vie politique à la fin du XIIe siècle, c’est-à-dire à un moment où l’Aquitaine englobe la région de Poitiers et celle d’Angoulême, et aussi de Saintes.
Les données de la géographie ont une vie longue. Moi qui suis natif de Bordeaux et qui ai vécu à Poitiers avant de venir à Angoulême, j’ai compris depuis longtemps que la Charente, et en particulier Angoulême et son ancienne ceinture industrielle, ont toujours regardé vers la Gironde, alors que Poitiers a toujours été une région intermédiaire, un lieu de passage et de batailles, de Clovis à Charles Martel et au-delà.
Il faut souligner aussi une autre donnée de l’histoire : la place décisive des hommes (ou des femmes) qui influent personnellement sur le cours de l’histoire : d’Aliénor d’Aquitaine à Félix Gaillard, à René Monory, à Georges Chavanes, en passant par Jacques Chaban-Delmas, on sait que des décisions politiques ont été prises à cause du poids de certains personnages plus ou moins identifiés aux villes et aux régions qu’ils représentaient. Cela est toujours vrai et l’on n’ose pas citer ici le nom de Madame Ségolène Royal, qui vient de l’Est de la France et dont les références sont plutôt à Paris…
L’EXPÉRIENCE DE L’ÉGLISE
En matière de découpage régional, l’Église catholique peut donner quelques conseils, liés à sa longue expérience.
Nous nous demandons depuis longtemps si les structures régionales de l’Église doivent se calquer sur celles de la société civile. Il faut aussi tenir compte d’un autre élément lié aux temps que nous vivons et à l’affaiblissement des institutions catholiques : faut-il plutôt se regrouper ou faut-il rester proches des terrains locaux? Ces deux attitudes inspirent des pastorales différentes : certains, qui redoutent l’avenir, poussent aux regroupements des paroisses et peut-être des diocèses, d’autres pensent qu’il vaut mieux, avec des forces diminuées, pratiquer la charité du Christ au plus près des personnes. Le débat est ouvert sans doute pour longtemps.
Tout cela étant dit, il faut reconnaître qu’il y a une dizaine d’années, les conseils venus du Vatican et de la Congrégation des évêques nous ont poussés à circonscrire nos régions ecclésiastiques à partir des métropoles, en laissant aux autorités romaines le soin de choisir les archevêques métropolitains (pour nous ceux de Bordeaux et de Poitiers).
Je n’ai pas été favorable à cette réforme qui a abouti à de nouvelles provinces ecclésiastiques (pour nous celle qui rassemble les diocèses de La Rochelle, Angoulême, Poitiers, Limoges et Tulle). J’estime que ce choix ne résistera pas aux évolutions de l’histoire, et spécialement à ce mouvement inéluctable qui oriente les deux Charentes vers Bordeaux et vers l’Aquitaine. Et qu’à Poitiers, on se souvienne d’un synode provincial qui se réunit à Bordeaux en 1850, au cours duquel Mgr Pie joua un grand rôle et où ce fut l’abbé Antoine Cousseau, futur évêque d’Angoulême, qui fut chargé de demander au pape Pie IX de proclamer saint Hilaire de Poitiers docteur de l’Église ! Ce qui montre que, dans la vie de l’Église, les personnes sont plus importantes que les structures…
On peut souhaiter, en tout cas, que la prochaine réforme des régions soit réaliste en reliant le Poitou-Charentes à l’Aquitaine, et qu’une nouvelle région ecclésiastique aille de Poitiers à Bordeaux, et de Cognac à Pau, à cause de François Ier, notre ancêtre…
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