L’aide
sociale et les minima sociaux coûtent environ 70 milliards
d’euros par anaux
finances publiques, soit 3 % du produit intérieur
brut (PIB). Ces prestations contribuent
de façon décisive à réduire la pauvreté et les inégalités.
Face
à cela, le coût de « l’assistance aux plus riches »
pourrait être de l’ordre de 150 milliards d’euros par
an hors
fraude et évasion fiscales,
et de l’ordre de 250 à 300 milliards au moins en incluant ces
deux derniers coûts, comme le développait un billet
de blog récent.
Avec comme impact certain un creusement des inégalités et en
particulier un enrichissement devenu indécent des très riches : les
500 individus les plus riches gagnent en moyenne 1 670 fois
plus que la moyenne des plus pauvres.
Je précise : 1 670 fois plus, après impôts.
On
peut retenir trois grands postes de « cadeaux » aux plus
riches. Chacun d’eux a été développé et amplifié par étapes
depuis le milieu des années 1980. C’est aussi depuis ce
moment que les inégalités, qui avaient nettement reculé depuis
1900 et au cours des « Trente Glorieuses », ont repris
une tendance à la hausse.
Cette
dernière s’est certes avérée moins forte qu’aux Etats-Unis,
mais elle est néanmoins nette, comme l’indique entre autres
constats l’évolution de la part du revenu des ménages
« accaparée » par les 1 % les plus riches.
Niches fiscales et niches sociales :
Le
premier des principaux postes de « coûts de l’assistance aux
riches » est constitué des niches fiscales et des « niches
sociales » (réductions ou exonérations de cotisations
sociales). Certaines répondent à des objectifs d’intérêt
général, comme les réductions d’impôt pour les dons aux
associations ou pour des travaux d’isolation. D’autres
bénéficient avant tout aux personnes plus riches et ne peuvent pas
être considérées comme justes. D’autres vont aux entreprises,
comme des crédits d’impôt ou des exonérations de cotisations
sociales. Ces dernières sont le plus souvent défendues au nom de
l’intérêt général (l’investissement, l’emploi, etc.)
mais quand elles remplissent mal, ou pas du tout, ces missions, elles
ne font que grossir les bénéfices non réinvestis et les dividendes
et, in
fine,
c’est principalement dans la poche des riches qu’on les retrouve.
Un rapport
parlementaire de 2010estimait
que les « niches » accordées depuis 2000 représentaient
un total de 100 à 120 milliards d’euros de pertes de recettes
fiscales à la fin de cette décennie. Si on y ajoute les gros
morceaux ajoutés en 2014, lec d’impôt compétitivité
emploi (Cice) et le pacte dit de responsabilité, on doit
approcher les 150 milliards d’euros de niches fiscales.
Il faut y ajouter les « niches sociales », estimées
par Le
Monde à
52 milliards de coût pour la Sécu.
Si on estime, en étant « modestes », que la moitié des
quelque 200 milliards de niches fiscales et sociales relève de
l’intérêt général, le reste est du cadeau sans contrepartie.
Une fiscalité de plus en plus douce :
Le
deuxième gros poste correspond à la forte baisse de la fiscalité
des plus riches et des entreprises depuis une trentaine d’années.
On peut estimer à 50 milliards d’euros au moins (voir ici )
le cadeau fiscal accordé aux riches, par rapport aux taux, seuils et
tranches qui existaient encore au milieu des années 1980, pour
l’impôt sur le revenu et pour l’impôt sur les sociétés, et
par rapport aux normes de 2000 pour l’impôt sur les successions et
donations.
A
ce stade, le montant atteint 150 milliards d’euros de coûts
publics de l’assistance aux riches, plus de deux fois les aides
sociales destinées aux plus pauvres et précaires. Mais il reste une
troisième rubrique, qui concerne l’évasion fiscale et la fraude
fiscales, qu’il semble légitime d’assimiler à des « cadeaux »
aux plus riches dans la mesure où il est certain que des politiques
publiques déterminées pourraient mettre fin à – ou
réduire dans de fortes proportions – ce que certain.e.s
militant.e.s nomment « du vol en bande organisée ».
Au moins 100 à 150 milliards par an :
La
fraude fiscale « nationale » peut se distinguer de
l’évasion, bien qu’une bonne partie de l’évasion fiscale à
l’étranger soit frauduleuse. Pour la seule évasion à l’étranger,
les estimations prudentes la situent généralement entre 60 et
80 milliards d’euros par an.
Dans
un billet de juin 2017 qui s’appuyait sur une expertise de
Gérard Gourguechon, je posais la question : « Fraude
et évasion fiscale en France : 200 milliards
par an ?1 Sur
cette base, on peut estimer que le coût annuel de l’évasion et de
la fraude fiscales est compris entre 100 et 150 milliards par
an, sans être excessif.
Emmanuel
Macron prétend qu’il n’y a pas d’argent magique, mais il
semble bien que la magie opère quand il s’agit d’argent allant
vers le haut.
20/06/2018
Jean
GadreyProfesseur
honoraire d'économie à l'Université Lille
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